Caractérisée par la dictature de la communication en temps réel et par l’explosion des réseaux sociaux, notre époque laisse a priori peu de place à l’écrivain. Cette place, il doit se la faire lui-même. A lui, donc, le redoutable défi de s’imposer dans un contexte où l’immédiateté et l’émotion prennent souvent le pas sur la réflexion. Pour autant, les idées comme la réflexion n’empêchent pas les saillies, les humeurs voire, pour parler le langage actuel, la proactivité et l’interactivité. C’est la vocation même de ce blog.

Beaucoup de mes écrits ont été consacrés à l’actualité internationale, qu’il s’agisse d’Israël, du Proche-Orient et surtout des Etats-Unis, mon thème de prédilection. D’autres concernent la France et sa politique, des premières amours qu’on n’oublie pas si facilement et qui se rappellent volontiers à notre souvenir. Plus récemment, mes préférences m’ont conduit à vagabonder sur d’autres chemins, plus improbables encore : le monde du spectacle et le show-business qui reflètent d’une manière saisissante les aspirations et les illusions de nos sociétés.

Tels sont les thèmes principaux, quoique non exclusifs, que je me propose d’aborder avec vous, semaine après semaine, dans le lieu d’échange privilégié qu’est ce blog. Il va de soi que je ne me priverai aucunement d’aborder d’autres sujets qui me tiennent à cœur. Je le ferai à ma manière : directe et sans concession, parfois polémique mais toujours passionnée. Tant il est vrai que, dans ses turbulences même, la passion est la sœur jumelle de la sincérité.

dimanche 31 mars 2013

Les menteurs de la République (I)

Avec un intitulé pareil, le lecteur pensera instinctivement qu'un article du blog ne saurait suffire. Et il aura raison.Le présent article n'est que le premier du genre. Peu importent au demeurant les accusations classiques de démagogie, de populisme voire de poujadisme qu'attire ce genre de propos. Contrairement à ce que soutiennent certains gens de gauche en butte avec le réel de la vie (l'expression est d'ailleurs en soi pléonasmique) toute vérité est bonne à dire. Et si elle dérange, il faut s'en prendre à ceux qui en sont responsables.

Les responsables donc, ceux qui avaient inspiré aux socialistes des années quatre-vingt un de ces dictons ineffables dont ils avaient le secret : responsables mais pas coupables. L'affaire concerne un propos tenu ce jour par Nathalie Kosciusko-Morizet sur la candidate socialiste à la mairie de Paris, Anne Hidalgo. NKM a en effet accusé sa probable future adversaire d'avoir été condamnée en 2012 à 20 000 euros d'amende pour travail déguisé à l'APUR (Atelier d'urbanisme de la ville de Paris) dont Hidalgo était la présidente en sa qualité de première adjointe à la mairie. 

"Mensonge" réplique, outrée, cette dernière avec le laïus de circonstance sur des dérives politiques malvenues. Dans le fil d'un tel élan de pureté mêlée d'indignation - une des spécialités socialistes - on se serait attendu à ce que Mme Hidalgo fournisse les preuves tangibles de la soi-disant exagération mensongère de NKM. Que nenni ! Et pour cause, il ressort en effet qu'une condamnation a bel et bien été prononcée pour infraction à la législation du travail à la suite de deux plaintes déposées par l'inspection du travail au tribunal de police : la première dénonçait du travail dissimulé au sein de l'APUR tandis que la seconde faisait état de dépassements d'horaires de la part de cette même association.

Que réplique en l'espèce Mme Hidalgo ? Elle fait valoir que l'APUR a été à deux reprises dispensée de peine. Ce qui l'autorise sans doute, croit-elle, à pouvoir traîner à son tour NKM devant les tribunaux pour diffamation ...

L'ennui avec Mme Hidalgo, comme avec toute l'équipe Delanoë depuis ces dernières années et comme tous les socialistes depuis au moins trente ans, est qu'elle semble prendre le public pour de parfaits benêts. A qui la candidate socialiste peut-elle faire croire sinon aux demeurés que la dispense de peine efface en soi la condamnation qui l'a justifiée ? La peine peut bien être rayée d'un trait de plume, elle n'enterre pas pour autant le délit qui a entraîné la condamnation, laquelle demeure bien entendu. Or c'est bien d'un délit dont l'association en question, et par voie de conséquence sa présidence en exercice, s'est rendue coupable.

Mme Hidalgo espère-t-elle pouvoir se débarrasser de NKM avec une telle désinvolture ? Elle aurait bien tort et son action en rétorsion risque fort de se retourner contre elle en boomerang. D'ailleurs, il il ne s'agit guère d'un incident isolé. La même Mme Hidalgo n'a-t-elle pas été par ailleurs élue sur la liste de Jean-Paul Huchon, un homme condamné définitivement pour prise illégale d'intérêts ? Cela ne semble pas l'avoir dérangée. Il est vrai que cela n'a pas non plus défrisé l'intéressé ni effarouché la justice qu'un élu avec  de telles casseroles puisse continuer à exercer les fonctions de président du conseil régional d'Ile-de-France.

J'entends déjà certains gens de gauche se récrier sur le mode : mais avec la droite, ce n'est pas mieux ! L'argument est d'autant plus court que la droite ne s'avise jamais de donner aux autres des leçons de morale. Là nous avons avec les socialistes de "Moi président" la prétention d'une République exemplaire. Aussi exemplaire, sans doute, que le fut celle de Mitterrand avec les affaires en cascade de son fils Jean-Christophe (condamné), avec le Carrefour du Développement (ses responsables condamnés), avec ... mais fermons le ban pour cette fois !

dimanche 24 mars 2013

Citoyens comme les autres

S'ils ne sont pas plus intelligents que tout un chacun - nonobstant leur passage par cette Ecole nationale de la magistrature que les intéressés tiennent pour le gotha - les magistrats ne sont pas plus stupides non plus. Ils savent fort bien qu'insistant sur le principe de la justice rendue à un ancien président de la République comme à un justiciable comme les autres, ce qui ne saurait être contesté, ils évitent d'évoquer leur propre statut. Or, il y aurait tant à dire !

Dans quelle autre profession verrait-on une faute manifeste échapper à toute forme de sanction ? Un avocat peut voir sa responsabilité civile engagée s'il se trompe, de même qu'un chirurgien peut être passible des tribunaux s'il rate une opération. Certes, pour les fonctionnaires de l'Etat c'est moins net. Mais en ce qui concerne les magistrats c'est tout à fait limpide : irresponsabilité totale. Les juges ont beau parfois jouer avec la vie des gens, commettre des erreurs qui poussant le justiciable à l'irréparable. Le tarif est le même quel que soit le cas de figure : impunité, irresponsabilité.

Il y a des années de cela, lorsque j'étais sous-préfet, une réunion nous avait mis en présence d'Eva Joly, alors au sommet de sa gloire. Cette émule de Fouquier-Tinville nous expliquait alors calmement qu'il était parfaitement normal qu'un membre du corps préfectoral puisse être mis en cause pour une mauvaise appréciation d'une situation mais pas un juge. Ce qu'il y avait de choquant, avec elle comme avec nombre de magistrats, c'était l'arrogance et la suffisance avec lesquelles était énoncée une telle certitude. Comme si les magistrats se pensaient définitivement au-dessus du reste du corps social.

La suffisance et l'arrogance, les avocats en font l'amère expérience au quotidien : réflexions insultantes en pleine audience, rires méprisants à peine voilés pendant les plaidoiries, opinions personnelles insolemment affichées et j'en passe. Le florilège est infini qui illustrerait la rigidité et la bouffissure de cette caste qui se croit supérieure parce qu'elle incarne un pouvoir intouchable et sans contrepartie ou presque.

Mieux encore, ces magistrats entendent soutenir que non seulement ils doivent rester irresponsables mais encore au-dessus de toute forme de critique ! L'affaire Sarkozy est révélatrice d'une telle mentalité mais elle est loin d'être la seule. Un quidam viendrait-il insulter un président de la République ? La peine qu'il encourrerait ne serait que symbolique au nom de la sacro-sainte liberté d'opinion dont on ne répétera jamais assez qu'elle ne présente pas de caractère absolu. Ce même quidam viendra-t-il proférer les mêmes propos à l'encontre d'un magistrat ? Cela serait jugé intolérable, insupportable par l'ensemble de cette profession qui affiche son corporatisme comme un cache-sexe.

Ainsi le juge Gentil entend porter plainte contre Henri Guaino qui l'avait accusé de déshonorer la profession et les institutions. Et alors ? Qu'auraient dit les juges si M. Guaino, en sa qualité de député, ou un représentant de l'exécutif - un ministre voire le président - avait fait l'objet d'une telle charge ? On peut déjà le deviner : rien. On doit donc en déduire que les juges ne se placent pas du tout sur un pied d'égalité avec les autres citoyens de ce pays. Mais qu'est-ce qui les les autorise à une telle prétention ? La légitimité de l'élu ? Non point. Une quelconque supériorité morale ? Pas davantage. Tout simplement le fait d'être magistrat et de se trouver de fait protégé par un statut faisant fonction de paratonnerre absolu et, croient-ils, éternel.

C'est bien là où le bât blesse. Quel que soit son autisme, la profession aurait tout intérêt à se remettre en cause même si cela n'a jamais été sa complexion naturelle. La société ? Les juges ont beau s'en moquer ou la mépriser, elle n'est pas figée. Elle évolue plus vite qu'ils ne l'imaginent et, avec elle, les mentalités collectives. Coupée de sa justice qu'elle ne comprend manifestement plus, notre société n'est plus forcément prête à accepter aujourd'hui ce à quoi elle se résignait hier encore. A ceux qui ne le comprendraient pas encore, on dira qu'il est plus facile de changer d'institution judiciaire que de changer de société.

Si le ou les juges qui ont joué ce sale tour - un "mauvais coup" porté à la République, précise Me Kiejman avec sa pertinence coutumière - à N. Sarkozy croient un seul instant qu'ils briseront sa carrière, avec la bénédiction soi-disant passive de l'Elysée, ils se trompent lourdement. Ils sont tout simplement en train de le victimiser. Ils sont au contraire de se tirer une balle dans le pied en ouvrant une voie royale à l'ancien chef de l'Etat pour son retour au pouvoir. C'est plus tard que les comptes se régleront. En toute franchise, il est à souhaiter qu'ils le soient. Enfin.

vendredi 22 mars 2013

La justice de mon pays

La phrase a été tellement galvaudée par les politiques de tous bords qu'elle est aujourd'hui totalement vidée de toute signification : "J'ai confiance dans la justice de mon pays". Irénisme ? Hypocrisie ? Je m'interroge dans la mesure où chacun sait que l'opinion publique dans sa majorité ne fait plus confiance depuis belle lurette aux juges et aux magistrats.

Imbus de leur fonction, souvent méprisants envers les avocats comme les justiciables, sectaires et politisés à l'occasion, ils ont perdu une grande partie de leur crédibilité au fil du temps. Corporatistes, ils se montrent d'une agressivité sourcilleuse dès que s'esquisse la moindre critique. Dès qu'on s'avise de mettre en cause leur responsabilité professionnelle, ils n'hésitent pas à former le carré en se prévalant, scandalisés, de l'indépendance de la justice. Irresponsables ils sont, irresponsables ils veulent farouchement demeurer. En un sens, d'aucuns estimeront qu'ils sont beaucoup plus irresponsables qu'ils le supposent eux-mêmes.

Mais, au fond, qui croient-ils tromper ? Ne contribuent-ils pas d'une façon dramatique au discrédit de nos institutions ? Depuis Outreau et ses conséquences dérisoires pour les magistrats impliqués, le public sait à quoi s'en tenir. Qui se souvient aujourd'hui de l'incurie comme de la partialité stupéfiante du juge Burgaud ? L'oubli est souvent salutaire pour le déroulement d'une carrière et la justice sait fort habilement en jouer. Des gens ont été brisés en cette occasion mais d'autres aussi, anonymes, en font les frais quotidiennement dans tous les prétoires de France et de Navarre.

Les juridictions judiciaires ne sont pas seules en cause, loin de là. Que de mentalités à évacuer tout aussi bien dans certaines juridictions administratives voire prud'hommales? Tout le monde le sait, beaucoup s'en plaignent mais personne n'ose le dénoncer. Tétanisés à l'idée de compromettre leur relations avec les magistrats - il faut bien que tout le monde vive, n'est-ce pas ? -, les avocats en sont souvent réduits d'une manière schizophrénique et en tout cas peu glorieuse à prendre le parti des magistrats quand ils sont attaqués. Infiltrée par la gauche, la presse quant à elle crie au poujadisme dans une telle situation. De fait, les juges se croient tout permis et se permettent d'ailleurs tout.

Naguère, l'inénarrable Eva Joly et son acolyte de triste mémoire Laurence Wichniewski, s'étaient acharnées des mois durant sur Roland Dumas ... pour aboutir à un non-lieu dont les attendus furent en tous points accablants pour la façon dont avait été menée l'instruction. Qui les a inquiétées pour leur parti pris scandaleux ? Cela a-t-il empêché Mme Joly de dormir et de continuer à vaticiner avec arrogance ?

La politisation n'est que la partie immergée de la défiance de l'opinion publique à l'égard de leur justice. On sait que l'Ecole nationale de la magistrature est très ancrée à gauche. Nul n'ignore également la coloration idéologique du fameux Syndicat de la Magistrature qui s'est créé en 1968 et n'a pas oublié les conditions de sa naissance. Regarder ou écouter ses leaders, qui sont des attitrés des médias, suffit à se faire une petite idée de la rigidité comme du sectarisme de ce syndicat. On n'oubliera pas que l'an dernier il n'a pas craint d'appeler à voter contre N. Sarkozy. Il n'est guère surprenant qu'on le voie monter sur ses grands chevaux pour voler au secours du juge Gentil - le cosignataire d'une pétition contre Sarkozy l'année dernière - qui vient de mettre en examen Nicolas Sarkozy sur le fondement ubuesque d'abus de faiblesse.

Quant à la concomitance entre l'affaire Sarkozy et l'affaire Cahuzac, qui se trouve de facto enterrée sur le plan médiatique, elle reste plus que suspecte. On peut dauber à l'infini la théorie du complot. Celle-ci ne sera pas évacuée au seul motif que la convocation à l'ancien président a été sans doute antérieure à démission de J. Cahuzac. En effet, une partie de la presse trouve presque normal que "Moi président" ait été tenu au courant du rebondissement en temps suffisamment opportun pour pouvoir gérer avec rapidité le cas de J. Cahuzac. Mais si cela était avéré, il apparaîtrait que "Moi président" avait été informé par la chancellerie de la mise en examen de son prédécesseur avant même qu'il ne se fût trouvé face au juge Gentil, c'est à dire avant une confrontation qu'on qualifie de soi-disant décisive. Dès lors, il est légitime de s'interroger sur quel fondement juridique réel N. Sarkozy a été mis en examen, la confrontation avec le majordome et autres domestiques n'en étant que l'habillage destiné à amuser la galerie. Voilà un beau sujet d'investigation mais il est à parier que la presse française, dont on connaît le courage légendaire, ne s'y risquera pas.

Confiance dans l'indépendance de la justice, avez-vous dit ?  Demandons à la juge d'instruction Marie-Odile Bertella-Geffroy qui avait mis Martine Aubry en examen sur le dossier de l'amiante et qui vient d'être déchargée du dossier par Mme Taubira (elle a d'ailleurs déposé un recours devant le Conseil d'Etat) ce qu'elle en pense. Indépendance, vraiment ? Rappelons-nous la réplique cynique de "Moi président", lors du salon de l'agriculture, au gamin qui évoquait le nom de   Sarkozy : "Tu ne le verras plus". Une prémonition pour le moins curieuse, non ?



jeudi 21 mars 2013

Coïncidence

On sait désormais que les socialistes au pouvoir, dont l'incompétence et l'incohérence sont devenues criantes, ne reculeront devant rien pour conserver coûte que coûte le pouvoir. Malgré leurs échecs, leurs mensonges ou leur impopularité croissante. La droite est trop divisée et pusillanime pour le reconnaître ouvertement : mais qui pourrait nier que la justice est instrumentalisée par le pouvoir actuel, dans l'indifférence générale ?

Les fameuses discordances entre le temps de le justice et le temps politico-médiatique ont bons dos. Et il y a des coïncidences qui seront difficiles à ne pas être interprétées pour ce qu'elles sont, à savoir de vulgaires contrefeux. Ainsi, au moment même où Jérôme Cahuzac vient de quitter son ministère - célébré en héros non sans indécence par ses amis socialistes... pour ses grandes qualités morales sans doute  - face au soupçon de "blanchiment de fraude fiscale", ce qui n'est pas rien, on remet comme par hasard le couvert avec Nicolas Sarkozy. Voici donc que le juge qui instruit l'affaire Bettencourt à Bordeaux convoque l'ancien président pour le confronter à ... un domestique ! Au-delà de la justification de pseudo-égalité entre citoyens, il reste tout à fait évident que le but recherché était d'humilier publiquement N. Sarkozy. Et ce, d'autant plus que ledit juge n'a probablement plus rien à se mettre sous la dent et cherche à se faire mousser à travers l'inévitable retentissement médiatique. Partant du point de vue suivant lequel l'information chasse l'information, le but recherché était tout autant d'évacuer comme si de rien n'était l'engouement de la presse pour l'affaire Cahuzac.

Ce qui arrive à Sarkozy est de bonne guerre, laissent entendre sans le dire une partie des journalistes, dans la mesure où l'ancien président cachait de plus en plus difficilement son désir de revenir dans la course. On voit à quel niveau on est tombé : puisqu'il cherche à refaire de la politique, et qu'il serait en tout état de cause le candidat le plus sérieux pour la droite, il est "normal" - au sens du "président normal" sans doute - que ses adversaires fassent de tout pour l'en empêcher ...

De l'avis général, l'affaire Bettencourt de même que celle de Karachi ne devrait pas contribuer à entamer sérieusement le crédit de l'ancien président. Il en va tout autrement pour l'"affaire Tapie" qui fait déjà saliver les amis du gouvernement. Autre coïncidence, à cet égard : au moment même où Jérôme Cahuzac démissionnait, les juges décidaient de perquisitionner chez Christine Lagarde. Comme s'ils pouvaient croire un seul instant qu'ils y découvriraient quelque chose ! La ficelle est tout de même grosse mais qu'importe !

La leçon - on n'ose parler de morale - de ces coïncidences qui n'en sont sans doute pas ? Elle est double. D'un côté, la séparation des pouvoirs n'est qu'une fiction pour une gauche prompte à se parer de valeurs morales qu'elle n'a jamais eues. Et pas seulement à Marseille. En tout cas, depuis la démission de Cahuzac, on sait à quoi s'en tenir sur le gouvernement exemplaire de "Moi président". D'un autre côté, l'indépendance et l'impartialité de la justice ne sont qu'aimables plaisanteries. Mais cela, on le savait depuis longtemps et il ne faudra certainement pas compter sur Mme Taubira pour moraliser la situation. Bien au contraire ...

lundi 18 mars 2013

Psittacisme

Le vocable est peut-être compliqué mais sa signification est remarquablement simple en ce qu'elle désigne une répétition mécanique, un peu comme un perroquet. J'y songeais en prenant connaissance d'une dépêche d'agence annonçant le renoncement de Mme Taubira aux jurés populaires en correctionnelle qu'avait cherché à instituer Nicolas Sarkozy. On la plaint tant un tel renoncement a dû lui être pénible !

Alors pourquoi psittaccisme ? Parce qu'en l'espèce Mme Taubira - mais il y a bien d'autres ministres qui pourraient être pareillement concernés - a cru devoir se faire l'écho servile de la consigne affligeante qu'a fait passer "Moi président" dès son entrée à l'Elysée : prendre systématiquement, en toute chose, l'exact contrepied de son prédécesseur. On peut comprendre que c'est le lot de toute nouvelle équipe au pouvoir de chercher à se singulariser et d'apporter le changement par rapport à ceux qui l'ont précédée. Pour autant, on ne fera croire à personne qu'il n'y a pas, dans toute l'oeuvre présidentielle de Nicolas Sarkozy, au moins une mesure qui tienne la route donc à conserver. Sauf à le diaboliser et c'est bien là le problème.

Prétendre froidement que Sarkozy fut mauvais sur toute la ligne relève d'un sectarisme aussi revanchard que dérisoire. La gauche semble d'ailleurs avoir un problème dans cette volonté obsessionnelle et quasi caractérielle de chercher à effacer d'un trait de plume tout ce qui concerne N. Sarkozy. Elle est suspecte dans cette hargne jusqu'au-boutiste à le vouer en permanence aux  gémonies alors même qu'il n'occupe plus le pouvoir. Non seulement un comportement aussi univoque est malsain mais il révèle en creux une pathologie propre au hollandisme : puisqu'il n'a toujours, même près d'un an après sa victoire électorale, aucune idée claire sur la manière de concevoir une politique crédible pour le pays, il lui faut bien continuer à utiliser le repoussoir que représente encore pour certains la figure de Sarkozy.

Gageons que le repoussoir resservira, jusqu'à la corde s'il le faut. Avec les accents partisans de Mme Taubira - dont on imagine qu'il fait les délices du Syndicat de la magistrature - ou sur le ton de mépris souriant propre à Mme Vallaud-Belkacem. Au fond, tant d'acharnement contre l'ancien président n'est guère surprenant. Quel que soit le jugement porté sur sa politique, N. Sarkozy avait au moins à son crédit personnel le dynamisme, le courage et la volonté : autant de qualités qui font cruellement à l'équipe actuelle et à son pseudo-chef qui hésite toujours entre bomber le torse, comme au Mali, ou faire la synthèse, comme au bon vieux temps de la rue Solférino.

Il n'est pas étonnant non plus que le spectre du retour éventuel de Sarkozy provoque de telles réactions viscérales. Puisqu'il faut bien donner l'impression qu'on fait quelque chose alors qu'on ne maîtrise plus rien en réalité, on ânonne ce que bafouille le chef,  entre deux "euh" et trois hésitations. On se monte du col en jouant les "vous avez juridiquement tort parce que vous êtes politiquement minoritaire". On fait ce qu'on peut en somme, même si l'on ne peut plus beaucoup. Un peu de grandeur d'âme sauverait peut-être les choses. Mais,on le sait bien, les socialistes n'ont jamais brillé par leur hauteur de vue de même que par leur courtoisie : ce que vient encore de souligner récemment, non sans humour mais avec justesse, le "Pingouin" de Carla Bruni Sarkozy. Il est quand même un peu fort qu'on la montre du doigt et que l'on passe sous silence la goujaterie caractérisée de "Moi président" lors de la passation de pouvoir.

Dans ces conditions, que reste-t-il d'autre à la gauche qu'un comportement puéril de réitération du verbe employé par le chef ? D'aucuns parleront de réflexe mimétique. C'est beaucoup plus caricatural encore. Autrefois, Giscard reprochait à Mitterrand d'exercer le ministère de la parole. C'était sans doute vrai mais lui, au moins, savait dire autre chose que psalmodier à l'infini une improbable vulgate. Comme un perroquet.

dimanche 17 mars 2013

Charisme

Il y a longtemps que le vocable est galvaudé. Jadis, le charisme était la caractéristique de personnages exceptionnels en raison de la puissance de leur personnalité et de leur capacité de rayonnement. Aujourd'hui, la sous-culture journalistique aidant, il s'adresse au moindre clampin sortant un tant soit peu de la grisaille ambiante. Mais passons ...

Depuis quelques jours, la question du charisme rencontre une problématique d'un genre inédit avec les premier pas du nouveau Souverain Pontife, le pape François : le charisme relève-t-il de l'inné ou résulte-t-il d'une stratégie de communication pertinente ?

Bien sûr, il y a lieu de se méfier des a priori et des premières impressions qui peuvent s'avérer fallacieuses. Mais voilà un homme, Jorge Mario Bergoglio, qui n'a pas de véritable présence au sens où on l'entend d'artistes de scène. Il n'est pas Jean-Paul II et ne dégage pas cette impression de vitalité physique qui émanait de sa personne dès l'abord. Il n'est pas non plus Jean XXIII ou même Jean-Paul Ier qui suscitèrent d'emblée la sympathie tant par leur simplicité que par leur sourire dévastateur.

A le voir s'avancer un peu gauchement sur le devant de la loggia ouvrant sur la place Saint-Pierre, peu après le fameux "Habemus Papam", on aurait pu avoir l'impression d'un homme austère à mi-chemin entre l'intellectuel et l'apparatchik.On se serait trompé. Tout en étant d'une intelligence fine rehaussée par son éducation jésuite, le pape François n'est pas un pur esprit comme l'avait été son prédécesseur le pape Benoît. Aussi ne commettra-t-il pas si facilement d'impair politique. Peu familier de la Curie, il n'est pas davantage un bureaucrate et l'on attend les premières escarmouches avec une administration vaticane particulièrement sourcilleuse de son pouvoir.

Au fond, le nouveau pape François est un pragmatique qui semble avoir compris d'entrée de jeu la vérité de sa fonction, à savoir l'importance décisive de l'image. Le Vatican, on le sait, ne possède ni "divisions militaires" comme ironisait jadis Staline, ni puissance économique. Il lui reste l'influence spirituelle et l'utilisation intelligente de l'impact médiatique, surtout en un temps où l'église catholique traverse une crise de confiance sans précédent.

D'où le style simple, direct et redoutablement efficace qu'a donné le nouveau pape à sa communication, comme s'il avait fait cela toute sa vie. Et c'est cela précisément qui étonne le plus : sa maestria à entrer dans sa fonction - qu'on songe par comparaison aux difficultés pitoyables qu'éprouve le chef de l'Etat français à en faire de même, près d'un an après son élection - et la rapidité avec laquelle il construit son image. Le pape François semble avoir fait sienne cette loi dite des cent jours édictée par Roosevelt, qu'il met remarquablement en pratique par des discours clairs, des mots simples et par une inflexion particulière sur la modestie et la pauvreté. Sans avoir l'air d'y toucher, il se met personnellement en scène et n'hésite pas à solliciter la sympathie des fidèles en leur demandant constamment de prier pour lui. Il faut le reconnaître : c'est du grand art, tout particulièrement pour un néophyte. Le nouveau pape construit ainsi méthodiquement un charisme qu'on ne devrait pas tarder à lui reconnaître... Urbi et orbi.

Il y a une trentaine d'années, on qualifiait le président Reagan de "grand communicateur".  En sa qualité d'ancien acteur hollywoodien, il avait cela dans le sang. Avec le pape François, c'est tout autre chose. Cet homme n'est pas né communicateur mais il a compris d'instinct le caractère vital, pour son pontificat comme pour l'avenir à court terme de l'église, du contact et de la transmission ainsi que de l'image. Il sait déjà beaucoup de choses et ce qu'il ne sait pas, il l'apprend vite. Ceux qui le tiennent déjà pour un pape de transition ne tarderont pas à en être pour leurs frais. 

jeudi 7 mars 2013

Humour

Ils ont beau s'y essayer tant bien que mal, on sent bien que ce ne sont pas les Français qui ont inventé l'humour. Les thuriféraires de service ont beau gratifier "Moi président" d'un humour désopilant, ce dernier se rapproche plus volontiers de la méchanceté gratuite, et le plus souvent stupide, que de cette tournure d'esprit propre à nos voisins d'outre-Manche.

Mais il y a pire que lui encore avec tous ces gens qu'on prend l'habitude de qualifier d'humoristes. Le pli avait été donné, il y a quelques décennies, avec Guy Bedos et ses mesquineries à prétention politico-intellectuelles. Du moins restait-on plus ou moins à l'époque dans un cadre à peu près convenu hormis quelques débordements relativement marginaux.

Puis il y eut Coluche et Desproges, chacun avec son style propre, qui manièrent un humour d'autant plus grinçant qu'il se situait au second voire au troisième degré et pouvait légitimement ne pas être compris - voire mal interprété - par tout un chacun. Toutefois, à sonder les coeurs et les reins de leurs auteurs, l'exercice était peut-être contestable. Il n'en était pas pour autant indigne. 

On n'en est plus là aujourd'hui avec des soi-disant  humoristes de l'acabit de Dieudonné qui a fait de son antisémitisme pathologique de primate un fonds de commerce qui n'a pas encore été acculé, soit dit en passant, au dépôt de bilan. Ce qu'on décrit ici comme de l'"humour" n'est rien d'autre que de l'injure raciste et c'est bien la moindre des choses qu'il tombe systématiquement sous le coup de la loi. A ceux qui hurlent à la violation de la liberté d'opinion, on rétorquera que celle-ci, contrairement à ce qu'on peut penser, ne présente pas de caractère absolu au sens juridique et doit être rapportée à l'aune de la liberté d'autrui comme de celle de l'ordre public.

Il y a enfin, les anodins, les commentateurs de radio ou de télévision qui, souvent de gauche, se permettent de plus en plus souvent de décerner des brevets d'intelligence. Tel animateur radio fustigera ainsi Mme Frigide Barjot en la comparant désavantageusement à ... Lévi-Strauss comme si, d'ailleurs, cet animateur pouvait lui-même soutenir une telle comparaison. Plus récemment encore, c'est Christophe Alévêque, un des acolytes de Laurent Ruquier sur les ondes, qui vient de traiter publiquement Zinedine Zidane de "pute", de "panneau publicitaire à trois neurones, non sans ajouter que l'ancien footballeur était "con comme une bite". Parole d'intellectuel, on vous l'assure !

Naturellement, l'avocat d'Alévêque hurle à la violation du droit à l'humour, comme si d'ailleurs il s'agissait d'un droit de l'homme. Il est dans son rôle. Il faudrait néanmoins lui expliciter, afin qu'il ne sombre pas dans le ridicule, la différence entre l'humour et la lâcheté. C'est si facile d'insulter un absent à l'antenne. Facile aussi de s'en prendre à un footballeur dont on sait qu'il n'a fait ni l'ENA ni Polytechnique. Après tout, si Zidane décide de faire de l'argent, c'est bien son droit et l'on ne sache pas qu'il ait spolié la collectivité pour y parvenir.

Il faudrait également expliquer au conseil d'Alévêque la différence entre l'humour et l'insulte pure et simple : dans le cas de M. Alévêque, comme dirait l'autre, il n'y a pas photo. La justice l'a donc logiquement condamné à payer 5 000 euros de dommages et intérêts à Zidane pour injure. Pour ma part, je serais curieux de connaître le parcours universitaire et, accessoirement, le QI de ce M. Alévêque. Nul doute qu'il y aurait matière à ... humour !

mardi 5 mars 2013

Chers disparus

Coup sur coup, deux disparitions emblématiques qui ne peuvent laisser insensible notre bienpensance qui entend dicter le politiquement correct comme le moralement acceptable : Stéphane Hessel et Hugo Chavez. La coïncidence est plutôt malicieuse.

Le chantre des "indignés"a fini par être vaincu par l'âge. C'était prévisible car la biologie a fatalement le dernier mot. D'ailleurs, les "nécro-bios" des journaux étaient déjà peaufinées. Elles se sont évidemment bien gardé de s'interroger en temps voulu sur une biographie controversée à l'occasion de laquelle le vieux monsieur avait rien moins que menti sur sa soi-disant collaboration à la rédaction de la Déclaration universelle des droits de l'homme de 1948. Qu'importe ! Tout le monde fait comme si et conserve un silence pudique sur cet égarement véniel, comparé au reste de l'"oeuvre" de l'intéressé. Pensez donc, un juif qui condamne Israël et le sionisme ! C'est d'autant plus inespéré que le vieux monsieur n'hésitait pas à enfoncer obsessionnellement le clou en prétendant que l'occupation nazie avait été relativement "douce" comparée à celle d'Israël à Gaza ou en Cisjordanie...  Les résistants - ceux qui, en tout cas, n'ont pas eu comme Hessel la bonne idée de s'enfuir à Londres - apprécieront comme il convient.

Chavez, ce n'est pas l'âge qui l'a vaincu - heureusement, d'ailleurs, car il eût fallu patienter quelques décennies - mais la maladie. Le concert des éloges et le choeur des pleureuses ne sont pas une surprise. Autant pour ceux en provenance d'Amérique latine ou de Russie que pour ceux qui sourdent chez nous, en France. On dit le gouvernement gêné. On le serait à moins, s'agissant d'un dictateur populiste qui avait une conception très particulière de la notion de liberté. Evidemment, il était hostile à Israël et aux Etats-Unis. C'est pourquoi Mélenchon se sent aussi affligé par la disparition de Chavez que peut l'être la "grande démocratie cubaine". Les journalistes français, eux,  à la différence de leurs homologues anglo-saxons - sans doute ne pratiquent-ils pas exactement le même métier - se plaisent à souligner le "charisme" de feu Chavez. Il est vrai qu'avec des médias locaux à sa botte et avec des médias étrangers de gauche dégoulinant de complaisance, il n'avait pas grand mal. Ch. Taubira, elle, ne se retient qu'à grand peine : on sent bien derrière son éloge appuyé et ses déclarations d'amitié au peuple vénézuélien - lequel n'a jamais entendu parler d'elle et ne lui demandait, d'ailleurs, rien  - une certaine fascination d'ancienne indépendantiste pour Chavez. Quant à la droite, constante dans sa pusillanimité, elle n'ose émettre la moindre critique de peur de se faire tancer par Saint-Germain-des-Prés et la rue de Solférino. Présumons qu'elle restera tout aussi molle que "Moi, président" lorsque les héritiers désignés de Chavez - comme il sied à toute bonne démocratie populaire - s'aviseront bientôt de confisquer le pouvoir par la force.

Après tout, c'est ainsi que se forgent les légendes de ces soi-disant grands disparus. Mais sachons apprécier le moment comme il convient. Et tant pis pour Bolivar qui trouvera peut-être à l'avenir des successeurs autrement plus estimables qu'un militaire populiste et vulgaire qui relevait davantage de la psychiatrie que de la politique. Quant à l'esprit de la résistance française, il survivra très aisément à la disparition d'un imposteur. C'est en tout cas à souhaiter.

La nostalgie de l'allure

On peut aisément accepter le principe d'une accélération de l'histoire. De même peut-on se résigner à ce que tout ce qui a précédé la mondialisation - en gros, à partir de la chute du mur de Berlin - relève de la préhistoire. Et pourtant ! Sans être un nostalgique rétrograde du passé, force est de reconnaître que ce dernier avait tout de même de l'allure.

Il est vrai qu'on ne s'en rend plus vraiment compte à l'heure du principe de précaution qui bride, en même temps que certains excès, les élans, les  initiatives et, pour tout dire, le meilleur de la création. Aujourd'hui, à un niveau anodin, on doit avoir honte de fumer une cigarette ou de boire un coup : j'en parle d'autant plus volontiers que je ne fume quasiment pas et consomme très modérément de l'alcool. Hypocrite en diable, la censure va jusqu'à faire retirer les photos publiques ou publicités où l'on voit certaines stars fumer ou boire. L'exemple d'Alain Delon jeune, dont on a retouché la photo en vue d'une publicité pour Eau Sauvage de Dior en gommant la cigarette qu'il tenait alors entre ses doigts, est aussi stupide que désolant. Les Etats-Unis ont d'ailleurs fait bien pire que nous. Pourtant Humphrey Bogart aurait-il été ce qu'il fut sans cigarette ? Frank Sinatra aurait-il été le même sans son verre de Jack Daniel's en main ?

L'automobile et toutes les mesures pour l'éradiquer des centre-ville ou, plus généralement, pour l'émasculer au nom du politiquement correct offrent un autre exemple. Conduire en milieu urbain devient aujourd'hui franchement ringard tandis que conduire à grande vitesse est désormais assimilé à un comportement criminel. Je puis en  convenir dans une certaine mesure. Cela ne m'empêche pourtant pas de penser que les romanciers du XXe siècle qui adulaient l'automobile n'étaient pas forcément des demeurés. Qu'on songe à Roland Barthes qui comparait l'automobile à une cathédrale des temps modernes. Qu'on pense à Paul Morand et à ses Bugatti. Qu'on se rappelle Albert Camus et  sa Facel Vega ou encore Roger Nimier et son Aston Martin. Quelle allure tout de même ! Quelle allure jusque dans la mort, ajouterais-je en gardant à l'esprit la fin tragique des deux derniers au volant de leur véhicule. Un art de vivre et de mourir. Gageons qu'il y en a de bien plus sordides de nos jours.

Le manque d'allure, le prosaïsme, la médiocrité : voilà bien la tare rédhibitoire de notre époque actuelle qui a perdu le sens de la classe et ne suscite par conséquent aucune espèce de fascination. On peut bien nous opposer une morale à trois sous, rien n'y changera. Nous nous trouvons sous l'empire de l'interdit légitimé et décomplexé et de l'autocensure larvé. Surtout, nous avons oublié le sens de l'élégance. Dans ses mots à lui de poète, Léo Ferré ajoutait : "Nous vivons une époque épique et nous n'avons plus rien d'épique". Qui pourrait sensément le contredire ? Qui pourrait nier que ce présent contemporain manque affreusement de souffle ?  Et je ne parle évidemment pas du souffle de la nicotine ...