Lénine avait raison. Il
affirmait en son temps que les capitalistes étaient tellement stupides qu’ils
pourraient bien vendre aux communistes la corde qui, un jour, les pendrait. Un
siècle plus tard, les choses n’ont pas changé et les
« capitalistes », entendons les Occidentaux, sont toujours aussi
stupides dans leur défense dogmatique et indifférenciée de la démocratie. Comme
si cette dernière était une fin en soi et non un simple moyen destiné à étendre,
sous certaines conditions, la liberté et la justice.
Souvenons-nous, il n’y
a pas si longtemps au fond, de cette ineptie du président américain J. Carter qui n’hésitait pas à
voir dans le Shah d’Iran le mal absolu. Moyen quoi, nous avons hérité de
l’islamisme et Carter, d'ailleurs, du prix Nobel de la Paix ! Que valait-il mieux
alors ? Poser la question équivaut à y répondre. Il est vrai que nous,
Européens et Français en particulier, serions mal inspirés de nous gausser de
la myopie des Américains à l’époque. N’était-ce pas la France de V. Giscard
d’Estaing qui accueillit, protégea à Neauphle-le-Château et traita avec tous
les égards dus à une « victime de l’absolutisme » au passage, ce bon,
cet excellent ayatollah Khomeiny ?
Mais l’histoire se répète
furieusement et, contrairement à ce que pensait Marx, pas toujours sous la
forme bénigne d’une farce. Ici, George W. Bush fait une fixation obsessionnelle
sur Saddam Hussein au point qu'il en est résulté un Irak
durablement déstabilisé et à la merci du voisin iranien ainsi que des extrémistes de
tous poils. Là, N. Sarkozy n’a de cesse qu’il ne boute Khadafi hors du pouvoir
avec les résultats qu’on sait non seulement sur la Libye elle-même mais sur le
plan régional.
On nous rejoue une
partition analogue aujourd’hui avec l’Egypte. A ce qu’il paraît, l’Union
européenne, en la personne de son inénarrable commissaire Mme Ashton,
s’inquiète du sort réservé à M. Morsi, l’ancien président destitué. Peu
importe aux Européens le mal qu’ont pu faire à ce pays en moins d’un an, tout
particulièrement du point de vue des libertés, M. Morsi, les Frères musulmans et les
islamistes. Légalisme, légalisme ! Morsi était élu régulièrement et, dans
la situation actuelle, L. Fabius ne peut manquer d’y voir une situation « intolérable ».
Assez curieusement, il ne trouvait rien à redire à la gestion antérieure des
islamistes.
Idem en ce qui concerne
le Hezbollah. L’Europe s’est enfin décidée à inscrire sur sa liste noire la
branche armée de cette organisation mais non sa branche politique. Bel exemple
d'hypocrisie dans la mesure où il faudrait être bien malin pour faire le départ
entre le politique et le militaire. Il est vrai que l’argument avancé pour s’y
résoudre est infaillible : vous comprenez, le Hezbollah est une composante
incontournable de la politique libanaise. Ah bon ! Mais c’est bien sûr, il
fallait y penser. Mais à ce compte-là, il eut fallu supporter Hitler dont le
parti nazi, en 1933, était lui aussi une composante incontournable de la
politique allemande de l’époque. Et d’ailleurs, Hitler n’était-il pas parvenu à
la chancellerie le plus démocratiquement du monde ?