Bertrand Delanoë, à qui
on ne saurait dénier une fibre d’homme de spectacle et qui est par ailleurs un
amoureux authentique de football, aurait peut-être dû glisser un mot à la
ministre socialiste. Toujours est-il que l’affaire a été tranchée et c’est
Valérie Fourneyron, la bouche en cœur comme d'habitude, qui est venue
annoncer la bonne nouvelle au monde du football : la taxe à 75%
s’appliquera donc également aux joueurs dont le revenu annuel dépasse le
million d’euros, donc de facto à la charge des clubs. Le président de la Ligue
professionnelle, Frédéric Thiriez, dont le cœur est ou fut semble-t-il à gauche
et à qui on prêtait une certaine influence, n’a sans doute pas dû en revenir.
Certes, si l’on entend
situer l’affaire sur le plan étroitement moral, il n’y a effectivement aucune
raison d’épargner le domaine sportif. Et pourtant, que ne voit-on au-delà de
cette fameuse « justice » élémentaire que brandissent les socialistes
en toute occasion pour faire passer les mesures les plus aberrantes :
justice sociale, justice fiscale, entendons clairement « faire payer les
riches ». Entendons, plus précisément, faire payer les classes moyennes
(vous savez, ceux qui gagnent plus de 4 000 euros par mois comme disait
Hollande) et pour qui ? Pour quoi ? Pour abonder des dépenses
publiques tellement pléthoriques, et creusées allègrement par la gauche,
qu’elles en deviennent ubuesques ? Pour combler le trou d’une sécurité
sociale grevée d’abus et d’aberrations en tous genres ? Pour faire jouer
ce qu’on appelle « solidarité » et qui n’est en fait que de
l’assistanat dont les bénéficiaires croissent et multiplient sans fin ?
Revenons au football.
Libre aux gens de considérer que les stars du ballon rond sont des profiteurs
et ne méritent pas leur salaire. Oui, tout le monde le sait : la crise, le
chômage, les bas salaires, l’indécence des hauts revenus, etc, etc. Il n’en
reste pas moins que les stars de la NBA aux Etats-Unis gagnent bien davantage
au basket et que les golfeurs restent de loin les sportifs les mieux lotis.
Donc, tout est relatif.
Il y a ensuite la
réalité. Taxer tous azimuts, comme nos socialistes français en ont l’art
exclusif, est peut-être concevable mais à condition de ne pas scier la branche
sur laquelle on est assis. Or ces charges supplémentaires qui, répétons-le
encore, vont peser sur les clubs vont handicaper dramatiquement ceux-ci par rapport
à leurs concurrents étrangers, les grands du genre Real, Manchester ou Milan
pour ne citer qu’eux.
En effet, un grand
joueur y regardera désormais à deux fois et même davantage avant de rallier
notre Ligue 1 et ce, au moment même où la montée en puissance du PSG et de
Monaco représentait un appel d’air salutaire. Par conséquent, notre championnat
déjà peu attractif risque fort de retomber tout à fait dans ce qu’il est
depuis des lustres : une compétition de seconde zone par rapport au calcio italien, à la premier league
anglaise ou à la liga espagnole.
Est-ce là ce qu’on souhaite, quitte à verser ensuite des larmes de
crocodile sur des stades vides ?
N’oublions pas que le
foot est un spectacle. Un joueur comme Zlatan Ibrahimovic, pour ne citer que
lui, est incomparable à cet égard. Il peut enchanter, fasciner ou horripiler,
il ne laissera personne indifférent. Surtout, il provoquera un engouement et
fera vendre - maillots, abonnements TV - et son rayonnement rejaillira sur
tout notre football et fera des émules voire des fortunes. Mais cet homme a un
prix. Ceux qui le trouvent excessif ont des œillères, au nom d’une idéologie et
d’une soi-disant éthique bon marché, et sont tout bonnement incapables d’en
évaluer les retombées économiques globales.
Affirmer cela équivaut cependant
à prêcher dans le désert face à des gens dont l’ouverture d’esprit n’a jamais
été le point fort et qui continuerons, n’en doutons pas, à camper sur leurs
positions. Et pendant ce temps, nos clubs français se font platement éliminer
par des chypriotes ! L’histoire a montré qu’il était rare qu’un pays fort,
en ascension économique et en pleine confiance, ait un football médiocre.
L’inverse est évidemment vrai.
L’état de notre pays
est un peu à l’image de notre football : affaibli, désorienté, timoré,
courant après une gloire passée qu’il ne retrouvera sans doute plus. Qui plus
est, nous continuons de nous enfoncer encore davantage par la volonté d'une puissance publique qui somme les entreprises publiques que sont les clubs de
plier. Nul doute qu'ils devront s'y résoudre.
Pendant ce temps, nos
voisins italiens, espagnols, anglais ou allemands rigolent. Mais peu importe. Nous
Français, continuerons derechef à courir comme des dératés après une morale hypothétique
ainsi qu’une prétendue « bonne santé » qu’on s’empressera d’ériger en
modèle universel … quitte à en crever.