Le leader du PCF exige qu'un "résistant communiste" soit lui aussi honoré au Panthéon : l'indécence n'a décidément plus de limites ...
En ces temps où les
limites du convenable sont allègrement outrepassées et les barrières de la
décence impunément défoncées, le parti communiste nous apporte la preuve qu’on
peut encore et toujours aller au-delà.
J’écris « parti
communiste » tout court car il va de soi qu’il s’agit du PCF. Quel autre
pays européen compterait dans son paysage politique ce vestige suranné et
poussiéreux, témoin d’une époque révolue et relevant bien davantage de la
préhistoire que de l’actualité ? On a beau chercher, on serait bien en
peine d’en trouver un, y compris l’Italie où les communistes furent
incomparablement puissants et prestigieux durant la guerre froide : un Antonio
Gramsci, rappelons-le, était ainsi à cent coudées au-dessus d’un Maurice Thorez,
de même qu’un Enrico Berlinguer avait une tout autre dimension qu’un Georges
Marchais. Et pourtant le PCI a disparu corps et biens dans l’après-guerre
froide tandis qu’à subsisté, impavide et exempt de regrets comme de remords,
notre inénarrable PCF.
On aurait pu croire qu’on
avait tout vu ou entendu à ce sujet. Eh bien, non ! Voici aujourd’hui que Pierre
Laurent, leader du parti communiste et fils prodigue de ce grand stalinien
devant l’Eternel que fut son père Paul Laurent, s’avise de nous faire une crise
nerveuse à propos des récentes cérémonies du Panthéon, censées honorer la
mémoire de ces personnes hors normes que furent Germaine Tillion, Geneviève
Anthonioz-de Gaulle, Pierre Brossolette et Jean Zay.
Au fond, Pierre Laurent
avait presque tout compris. Il savait comme tout le monde que celui qui nous
sert de président avait suscité cette occasion dans le but évident de s’auto-glorifier :
ce qui n’a bien sûr pas manqué, sous l’œil inébranlablement émerveillé d’une
presse plus que jamais servilement béate. Si l’ancien chef du PS donnait ainsi
sans vergogne dans la récupération de la panthéonisation, pourquoi pas le PC ?
Pourquoi ne pas honorer un résistant communiste ?
Tel était précisément
le point où le bât blessait car notre bon Pierre Laurent faisait mine d’oublier
un simple petit détail : en 1939, fidèle aux enseignements du pacte
germano-soviétique de quasi-neutralité envers l’Allemagne nazie sur le point d’écraser
la Pologne (Moscou s’en partageant d’ailleurs les dépouilles de concert avec
Berlin), les communistes avaient décidé que cette guerre ne les concernait
nullement. L’Allemagne hitlérienne ? Une broutille, le véritable ennemi
étant le capitalisme. C’est ainsi que Maurice Thorez fut conduit à déserter de
l’armée française et à prendre dare-dare le chemin de la mère patrie soviétique
où il resterait au chaud jusqu’en 1945, du moins jusqu’à ce que de Gaulle le
fasse profiter d’une amnistie. Qu’étaient les résistants entre juin 1940 et
juin 1941, aux yeux des communistes français ? Rien que des voyous et,
pour un Paul Nizan mort à Dunkerque, combien de réfractaires au nom de l’idéologie ?
C’est ainsi également
que, lors de l’infâme procès de Riom que le régime de Vichy intenta aux
principaux chefs de parti de la IIIe République au premier rang desquels Léon
Blum, plusieurs députés communistes écrivirent au Maréchal Pétain pour se voir
accorder « l’honneur » de venir à la barre témoigner contre l’ancien
chef du Front populaire. Parmi ces sept parlementaires indignes, on comptait
notamment Virgile Barel député des Alpes-Maritimes, qui présiderait même un
court instant l’Assemblée nationale en qualité de doyen d’âge, et François
Billoux, député des Bouches-du-Rhône, qui deviendrait par la suite ministre. Et
pas n’importe quel ministre : en charge de la Défense nationale, il se
distinguerait une fois de plus en refusant de se lever de son siège de ministre
au Palais Bourbon pour saluer, à l’instar de tous les parlementaires républicains
de l’hémicycle, la mémoire des soldats français tombés au combat en Indochine.
Les communistes n’entreraient
dans la lutte contre le régime nazi que lorsque Staline en aurait décidé ainsi,
à savoir en juin 1941 et pas avant. Que la France fût envahie et à l’agonie ne
semblait pas alors perturber plus que cela les dirigeants du PCF. Un tel bilan
aurait pu paraître accablant. Mais c’était sans compter avec la force de l’organisation
communiste et son habileté de sa propagande, fût-elle grossière ou éhontée.
Dès juin 1941 donc, les
communistes s’attachèrent à investir méthodiquement les organisations de
résistance déjà constituées de longue date. Pour faire bonne mesure, ils en
créèrent de nouvelles, la plus célèbre étant celles des FTP (Franc-Tireurs et
Partisans). Ils réussirent tellement bien dans l’entrisme, une spécialité
trotskyste (demandez donc à M. Jospin ou à M. Cambadélis) que ne reniaient pas
les staliniens de la plus belle eau qu’ils donnèrent l’impression d’être majoritaires
et que la Résistance française était en grande partie d’obédience communiste.
Comme cela ne suffisait
pas, les communistes créèrent un mythe chemin faisant : celui du « parti
des 75 000 fusillés ». Ce mythe aurait la vie dure et serait resservi
systématiquement à la moindre occasion. En réalité, comme le soulignerait fort
pertinemment le socialiste Vincent Auriol dans ses Mémoires, il n’y eut probablement pas – et c’est d’ailleurs heureux
– autant de fusillés en France, tous partis confondus. Cependant les
communistes savent mieux que quiconque qu’il reste toujours quelque chose d’un
mensonge savamment réitéré et entretenu.
Aujourd’hui, Pierre
Laurent ne fait que prolonger cette tradition en tentant de faire accroire que
les communistes étaient des résistants de la première heure et de l’engeance de
ceux qui viennent d’être honorés. Ce n’est rien moins que de l’indécence. On
pourrait certes s’étonner de ce que celui qui loge actuellement à l’Elysée et
que n’étouffent pas les scrupules, n’ait pas déjà mordu à l’hameçon :
après tout, un de plus ou un de moins au Panthéon … Faut-il tout de même qu’il ait
compris, lui aussi, que les communistes ne pesaient électoralement plus rien dans
ce pays pour rester de marbre face à l’exigence indécente de Pierre Laurent !