Caractérisée par la dictature de la communication en temps réel et par l’explosion des réseaux sociaux, notre époque laisse a priori peu de place à l’écrivain. Cette place, il doit se la faire lui-même. A lui, donc, le redoutable défi de s’imposer dans un contexte où l’immédiateté et l’émotion prennent souvent le pas sur la réflexion. Pour autant, les idées comme la réflexion n’empêchent pas les saillies, les humeurs voire, pour parler le langage actuel, la proactivité et l’interactivité. C’est la vocation même de ce blog.

Beaucoup de mes écrits ont été consacrés à l’actualité internationale, qu’il s’agisse d’Israël, du Proche-Orient et surtout des Etats-Unis, mon thème de prédilection. D’autres concernent la France et sa politique, des premières amours qu’on n’oublie pas si facilement et qui se rappellent volontiers à notre souvenir. Plus récemment, mes préférences m’ont conduit à vagabonder sur d’autres chemins, plus improbables encore : le monde du spectacle et le show-business qui reflètent d’une manière saisissante les aspirations et les illusions de nos sociétés.

Tels sont les thèmes principaux, quoique non exclusifs, que je me propose d’aborder avec vous, semaine après semaine, dans le lieu d’échange privilégié qu’est ce blog. Il va de soi que je ne me priverai aucunement d’aborder d’autres sujets qui me tiennent à cœur. Je le ferai à ma manière : directe et sans concession, parfois polémique mais toujours passionnée. Tant il est vrai que, dans ses turbulences même, la passion est la sœur jumelle de la sincérité.

dimanche 12 février 2017

L’hystérie des bien-pensants en Amérique



Trop c'est trop ! Les critiques excessives qui s'abattent tous azimuts sur Donald Trump visent à lui ôter toute légitimité en attendant de prétendre écourter son mandat.


Il est des défaites qui sont décidément difficiles à digérer. Les démocrates américains en sont là. Trois mois après la déconvenue présidentielle de madame Clinton, ils ne décolèrent pas et multiplient manifestations et réactions envers son vainqueur. Les provocations aussi, d’ailleurs, qui ont débuté bien avant la signature du premier décret du nouveau président et même avant son inauguration officielle au Capitole. 

De mauvais perdants ? Cela ne fait guère de doute. Mais ce n’est peut-être pas l’essentiel car ces opposants irréductibles n’hésitent pas à se livrer à un jeu qui pourrait s’avérer dangereux pour la nation tout entière. Certes Donald Trump a été plutôt mal élu mais, sauf erreur, il a été tout de même élu régulièrement. Il a obtenu moins de voix populaire que son adversaire malheureuse mais ce n’est guère la première fois que cela se produit dans une élection présidentielle américaine. L’élection du candidat républicain reste tout ce qu’il y a de légitime. S’il avait existé le moindre doute à ce sujet, imagine-t-on que les détracteurs de Trump se fussent privés de la moindre contestation en justice ? 

Malgré tout, les opposants à Trump continuent leur guérilla qui va de manifestations de rues plus ou moins maîtrisées à des éditoriaux au vitriol. D’aucuns estimeront que c’est leur droit le plus strict de manifester et qu'il n'y a pas lieu de les quereller sur ce point. Pour autant où tout cela peut-il mener ? A une modération de la politique annoncée par Trump tout au long de sa campagne ? La perspective en est peu probable, quand bien même le nouveau président a déjà été saisi par un certain « pragmatisme », comme on dit élégamment pour désigner un revirement. A une remise en cause des institutions américaines ? La menace n'est pas à négliger.

Ici comme ailleurs, il faut se méfier de ces gens qui croient pouvoir se permettre toutes les outrances au nom des soi-disant « valeurs » de la démocratie. La démocratie, ce sont certes des valeurs – dont nul, soit dit en passant, ne peut se prétendre le dépositaire exclusif - mais aussi accessoirement des règles. Or la règle première, dans toute élection démocratique, est la reconnaissance par les perdants de la légitimité de la victoire, fût-elle ténue, de leurs vainqueurs. Il en a notamment été ainsi en 2000 lorsque le démocrate Al Gore avait reconnu le succès, quoique controversé, de son adversaire républicain ou encore, plus loin dans l’histoire, en 1960 lorsque Nixon avait reconnu la victoire de JFK alors même qu’il aurait pu s’estimer légitimement volé par ce résultat.

Soyons clairs. Trump peut bien tout à la fois gêner, choquer, effaroucher voire écoeurer. Il n’en demeure pas moins le détenteur du pouvoir légitime, sauf à courir le risque que soient entachées les consultations présidentielles à venir. Bien sûr, l’opposition doit conserver la possibilité de s’exprimer et de contester mais dans le cadre des modalités prévues par la Constitution : au Congrès ou dans l'exercice de libertés fondamentales à condition évidemment que celles-ci demeurent compatibles avec l'ordre public.

Or, répétons-le, les opposants à Trump jouent un jeu extrêmement périlleux en dramatisant à outrance la situation, qui est regardée comme un danger absolu, et en diabolisant le personnage. Comme s’il fallait pousser à la faute, le nouveau président dont on connaît par ailleurs le tempérament sanguin. Ou comme s’il fallait apporter la confirmation, contre toute évidence, d’une marche de l’Amérique vers la dictature. Michel Audiard l'avait écrit, dans un de ses dialogues de film : dans tout mauvais coup politique, il y a une république ou la démocratie à sauver...

Que Trump soit d’une complexion plutôt abrupte et d’un commerce assez peu agréable voire franchement vulgaire et qu’il renvoie une image moins valorisante que son prédécesseur Barack Obama est une évidence. Mais quel est l’intérêt de tout ce tombereau de critiques excessives déversées quotidiennement par la presse libérale c’est-à-dire de gauche ?

A suivre cette presse qui lui est ouvertement hostile mais qui se donne volontiers en exemple, Trump n’aime pas les livres et déteste la poésie : s’agirait-il là d’un nouveau critère pour prétendre à la Maison Blanche ? Et du reste, dans le passé, Truman, Eisenhower, Johnson, Ford, Reagan, sans parler de « W » Bush, étaient-ils à proprement parler des littéraires ? A considérer d’autres critiques, Trump a un comportement exécrable envers les femmes … à ceci près qu’on n’a jamais entendu dans un passé récent les féministes dénoncer avec autant de vigueur le comportement autrement répréhensible d’un Bill Clinton, sans parler de l’hypocrisie foncière de son épouse. Pour couronner le tout, on fait à présent de Trump une sorte de « cas psychiatrique », ce qui avait été déjà le cas de Richard Nixon, lui aussi avili méthodiquement au quotidien par la presse libérale. La conclusion n'en est que trop limpide : les fous on les enferme mais on ne saurait discuter avec eux.

En fait, ces élites montent de la sorte aux extrêmes parce qu’elles demeurent surprises par la victoire de Trump et n’ont aucune idée de la manière de le combattre classiquement. Il est vrai que le nouveau président dispose d'une majorité au Congrès et se trouve en passe d’en détenir une à la Cour Suprême. Alors on transforme le président en une sorte de fou furieux ; ou encore, on envisage dès à présent la possibilité d’ici deux ans – dans l’hypothèse où la majorité au Congrès basculerait de nouveau en faveur des démocrates – d’engager une procédure d’impeachment. On en connaît presque déjà le motif avec les prétendus conflits d’intérêt de Trump. Gageons que des équipes sont déjà à l'oeuvre pour préparer des dossiers et dégager des motifs d'inculpation.

Tout à leur frénésie haineuse, ces opposants refusent obstinément de voir la réalité en face : à commencer par le fait que le succès électoral de Trump résulte prosaïquement du rejet fondamental par les électeurs américains des élites incarnées par Hillary Clinton et par le fait, non négligeable, que ce même succès traduit aussi a contrario un désaveu au moins partiel de la politique de Barack Obama. 

Quel crédit accorder à ceux qui n’hésitent pas à instiller, jour après jour, la stratégie du pire à l’instar de ces éditorialistes du New York Times qui n’ont rien appris ni retenu de l’élection et continuent leur œuvre de démolition comme si de rien n’était ? A les croire, le nouveau président se tromperait systématiquement sur tous les plans : sur le choix de son équipe ; sur sa position envers Israël, alors même qu’Obama, le dernier jour de sa présidence et contre tous les usages, n’a pas hésité à débloquer un crédit de 221 millions de dollars en faveur des Palestiniens ; sur sa politique européenne, comme si tous les présidents américains depuis au moins Kennedy n’avaient pas travaillé à affaiblir l’union du vieux continent ; ou encore sur sa politique envers la Chine, jugée trop agressive comme s’il fallait en toute occasion et au nom d’une paix à préserver s’incliner devant toutes les exigences et prétentions de Pékin.

Faisons tout de même un sort particulier à un de ces critiques parmi les plus virulents, le columnist vedette Thomas Friedman. A travers ses éditoriaux, il n’a aucune gêne à se faire l’arbitre péremptoire du juste et de l’injuste, du correct et du vulgaire sinon du vrai et du faux. Sans doute se croit-il le mieux placé pour s’y employer. Mais qui s’en souvient encore ? Il y a près d’une quinzaine d’années, cet infaillible M. Friedman vomissait la France de toutes ses forces parce qu’elle osait contredire l’Amérique sur la réalité d’armes de destruction massive irakiennes ...