Caractérisée par la dictature de la communication en temps réel et par l’explosion des réseaux sociaux, notre époque laisse a priori peu de place à l’écrivain. Cette place, il doit se la faire lui-même. A lui, donc, le redoutable défi de s’imposer dans un contexte où l’immédiateté et l’émotion prennent souvent le pas sur la réflexion. Pour autant, les idées comme la réflexion n’empêchent pas les saillies, les humeurs voire, pour parler le langage actuel, la proactivité et l’interactivité. C’est la vocation même de ce blog.

Beaucoup de mes écrits ont été consacrés à l’actualité internationale, qu’il s’agisse d’Israël, du Proche-Orient et surtout des Etats-Unis, mon thème de prédilection. D’autres concernent la France et sa politique, des premières amours qu’on n’oublie pas si facilement et qui se rappellent volontiers à notre souvenir. Plus récemment, mes préférences m’ont conduit à vagabonder sur d’autres chemins, plus improbables encore : le monde du spectacle et le show-business qui reflètent d’une manière saisissante les aspirations et les illusions de nos sociétés.

Tels sont les thèmes principaux, quoique non exclusifs, que je me propose d’aborder avec vous, semaine après semaine, dans le lieu d’échange privilégié qu’est ce blog. Il va de soi que je ne me priverai aucunement d’aborder d’autres sujets qui me tiennent à cœur. Je le ferai à ma manière : directe et sans concession, parfois polémique mais toujours passionnée. Tant il est vrai que, dans ses turbulences même, la passion est la sœur jumelle de la sincérité.

lundi 28 août 2017

Sex symbols, avez-vous dit ?



Les sex symbols du grand écran ont bien changé en quelques générations. Et pourtant, la sensualité comme la suggestion du désir restent quasiment les mêmes. 

A l’occasion de l’ouverture de la Mostra de Venise, j’ai été convié par une radio périphérique à deviser sur les sex symbols du cinéma italien. Vaste sujet qui m'est cher comme l'est plus généralement ce cinéma de Cinecittà sur lequel j'ai commis l’année dernière une histoire en forme de chronique consacrée à son âge d'or (1945-1975).

En fait, chacun d’entre nous ou presque a sa propre petite idée sur la question selon qu’il vénère Sophia Loren, Gina Lollobrigida, Claudia Cardinale ou encore Silvana Mangano ; ou selon qu’elle craque (désolé pour mon parti pris impudemment hétéro) pour Mastroianni, Gassman, Franco Interlenghi ou Massimo Girotti.

Une chose est en tout cas avérée : les canons de la sexualité ont été bouleversés depuis l’après-guerre. Si notre époque actuelle, à travers les top models, ces nouveaux objets sexuels, érige volontiers l’androgynie, sous-alimentée de préférence, en archétype de l’esthétique, tel n’était certes pas le cas il y a un demi-siècle. En ce temps-là, un brin antédiluvien je le confesse, les hommes préféraient les femmes aux formes généreuses ou avantageuses : poitrines épanouies et fesses bien en chair exsudaient ainsi une sensualité dont on n’a plus idée aujourd’hui.

Rappelons-nous la si plantureuse Marisa Allasio dans le très rafraîchissant Poveri ma Belli (Pauvres mais beaux) de Dino Risi, un film de 1956. Les cinéphiles gardent encore en mémoire sa robe rouge incarnat qui faisait chavirer les mâles de même que les ruses invraisemblables échafaudées par les deux sympathiques frères ennemis, Maurizio Arena et Renato Salvatori, pour se concilier les faveurs de la belle. Mais ce furent bien Sophia Loren et, à un degré moindre – pour cause de longévité inférieure à l’écran – Lollobrigida qui méritent sans conteste la palme de la popularité en ce domaine.

Sophia et ses formes voluptueuses qui mirent en transe jusqu’aux producteurs outre-Atlantique, lesquels en avaient vu pourtant d’autres : ce qui inspirerait à Risi une formule méprisante suivant laquelle les Américains étaient irrévocablement « un peuple de camionneurs » … Gina et ses tenues délicieusement dépenaillées de Bersagliera sauvageonne dans Pane, amore e fantasia (Pain, amour et fantaisie), au point d’affoler Vittorio de Sica alias le débonnaire maréchal (des logis) Carotenuto.

Un peu plus tard s’imposa, sur un registre moins pétulant voire un peu plus intellectualisé quoique non moins sensuel, Claudia Cardinale, égérie de Visconti et inoubliable interprète de La Fille à la valise, de V. Zurlini, ou de La viaccia, de M. Bolognini. Est-il fortuit que le romancier Alberto Moravia propose, un jour de 1961, à « la Cardinale » (comme l’appelait le grand Luchino) une interview sous forme de plongée philosophique dans le rêve et le temps ? Vint aussi, sur un registre plus sensuellement hard dans Malicia ou dans Sessomatto (Le sexe fou) Laura Antonelli qui formerait dans la vie, pendant plusieurs années, un couple de rêve avec Jean-Paul Belmondo.

Objets sexuels ? Sans doute mais pas uniquement car ces stars savaient aussi jouer la comédie et avaient même gagné de haute lutte la reconnaissance de la profession à ce titre. Après tout, Sophia Loren obtint le seul Oscar de sa carrière pour un rôle dramatique qu’elle interpréta avec maestria dans La Ciociara, un chef-d'oeuvre signé V. de Sica. Quant à la sublime Silvana Mangano dont les jambes interminables et la poitrine moulée dans son pull trop étroit ont si longtemps transformé le spectateur en voyeur, on ne sait plus aujourd’hui s’il faut s’attarder sur la sensualité torride qu’elle dégageait dans Riz amer de De Santis ainsi que dans Théorème de Pasolini ou dans son rôle de grande aristocrate dans Mort à Venise de Visconti. Pour cette raison même, ces stars exceptionnelles - à la différence notable de la sublissime Lucia Bosè - auront plutôt bien vécu leur vedettariat et n’auront pas été broyées par un système de production qui n’avait d’ailleurs rien de commun avec celui des grands studios hollywoodiens. De fait, aucune de ces étoiles filantes ne connut le destin tragique d’une Marilyn Monroe.

Une autre vérité transparaît de la carrière de ces sex symbols : ceux-ci ne se construisent pas patiemment, avec méthode et persévérance, mais émergent brusquement, presque brutalement, tel un coup de poing. Ainsi, aucun producteur italien se sera longtemps perdu en conjectures superflues sur le potentiel cinématographique d’une Monica Vitti, d’une Virna Lisi ou d’une Ornella Muti. De même, chez les hommes, le sex appeal d’un Massimo Girotti dans Ossessione (Les Amants maudits) de Visconti qui donna le coup d’envoi du néo-réalisme italien fut perçu d’emblée pour ce qu’il était, à savoir dévastateur. 

Il est vrai qu'existe une sorte de contre-exemple en la personne de Marcello Mastroianni. Ce dernier avait déjà une bonne dizaine d’années d’expérience sur les planches comme sur les plateaux – dans des rôles relativement secondaires de comparse – lorsque Fellini, contre vents et marées, eut l'idée géniale de lui confier le rôle principal du journaliste dans La Dolce Vita. Et ce fut l’explosion subite, inouïe, du latin lover : un rôle qu’abhorrerait d’ailleurs le principal intéressé toute sa carrière durant. Quoique multipliant les rôles à contre-emploi – les impuissants comme dans Bel Antonio, ou les paumés minables comme dans Drame de la jalousie – Mastroianni n’aura pu cependant empêcher qu’on le classe dans la catégorie des grands sex symbols de notre temps. Acteur exceptionnel, Marcello restera éternellement le séducteur absolu, celui à qui aucune femme ne peut résister. D'ailleurs, est-ce un hasard s’il eut pour compagne une certaine Catherine Deneuve ? Est-ce aussi un hasard si, le jour de sa mort, les eaux de la fontaine de Trevi furent arrêtées en signe de deuil ?

dimanche 27 août 2017

Vatican : une volonté de générosité bien inquiétante



Inspirées par une générosité désincarnée et étrangère aux réalités, les positions affichées par le pape François sur les migrants sont difficilement compréhensibles.

Est-ce dû au fait qu’il n’était qu’un outsider en 2013, lors de son élection à la succession de Benoît XVI, comparé aux papabili qu’étaient alors les cardinaux italiens Gianfranco Ravasi et Angelo Scola ou encore le Guinéen Robert Sarah ? Est-ce parce qu’il a eu lui-même d'emblée la conviction que son pontificat serait très bref, quatre ou cinq ans peut-être même seulement deux ou trois ? Voici que le pape François ne se contente plus d’adopter des postures atypiques ou à contre-courant. Ses dernières prises de positions sont carrément dévastatrices et mettraient même, à en croire certains commentateurs, l’Europe en danger.

Selon le pape, en effet, l’Europe faillirait aujourd'hui à ses devoirs humanitaires. La pression démographique qu’exerce l'Afrique et qui n’en est qu’à ses débuts ? Les tensions identitaires que subissent les pays européens qui s’ouvrent à des populations exogènes dont les valeurs sont souvent très éloignées de nos valeurs humanistes inspirées par les Lumières ? Le pape paraît étrangement les ignorer et entend même signifier que ce n’est pas son problème. Et de prêcher l'accueil pour tous, clandestins compris, et même l’accueil élargi des familles : ne réclame-t-il pas le «regroupement familial qui inclurait grands-parents, frères, sœurs et petits enfants ? Que la capacité de ces populations à s’intégrer dans un pays d’accueil soit plutôt sujette à caution n’est pas non plus apparemment le problème du Saint Père.

Pour lui, la «sécurité nationale» devrait passer après la «sécurité personnelle». Aussi fustige-t-il avec la plus grande vigueur la mise en détention de «ceux qui entrent sur le territoire national sans autorisation». Par là même, il prône imprudemment l'effacement du droit devant une certaine morale. Or, on le sait d'expérience, la morale n'a jamais fait une bonne politique. Voici à présent que le Saint Père, non sans quelque provocation, préconise l’accès illimité aux soins – gratuits, cela va de soi - et « aux systèmes de pension » au bénéfice des immigrants. Bien sûr, il refuse en même temps l'assimilation de ces nouveaux venus au motif que cela conduirait à supprimer ou oublier leur propre identité culturelle : quitte à donner de la sorte à l'assimilation une connotation restrictive parce que coercitive. Mais que les Européens d’origine voient leur propre identité culturelle menacée dans le même temps ne le préoccupe pas le moins du monde. Et que le Vatican accueille et prenne à sa charge quelques milliers de ces malheureux venus d’ailleurs ne lui vient même pas à l’idée. Assez curieusement et contrairement au vieil adage afférent à la charité, pour une fois générosité bien ordonnée ne commence pas par soi-même ...

Faut-il vraiment s’en étonner ? On l’oublie un peu trop souvent mais le pape François n’est pas Européen. Jorge Mario Bergoglio reste fondamentalement sud-américain et a d'ailleurs été formé dans l'esprit ce qu'on appelait dans les années 1970 la "théologie de la libération" qui reprenait à son compte une grande partie des thèses du socialisme révolutionnaire. Le saint homme n’a pas le vécu tragique des Européens - tel que sut notamment l'incarner Jean-Paul II - qu'il ne comprend sans doute pas au fond de lui, n’ayant jamais éprouvé leurs craintes ou leurs appréhensions. Fort d'un certain aplomb souriant, le pape François choisit délibérément le parti de l’innocence généreuse, désincarnée et abstraite.

En théorie, il n'est guère contestable qu'il est dans son rôle. Toutefois, dans la pratique, ce genre d’innocence flirte malheureusement avec l'ignorance. Il confine même à l'égoïsme en minimisant ou en se désintéressant ouvertement du désarroi des peuples européens face à une immigration devenue incontrôlable et à une culture islamique qui n’a jamais cherché réellement à s'intégrer. Innocence feinte et désintérêt affiché sont les deux composantes de ce que certains désormais désignent avec sévérité comme l’irresponsabilité du pape actuel.

Sa conviction d’une Europe multiculturelle ? C’est naturellement son droit et, du reste, le Saint Père n’est pas le seul à la défendre. En Allemagne, Angela Merkel a enfourché ce cheval de bataille dont se souviennent encore les femmes de Cologne. Chez nous en France – une formule moins pléonasmique qu’elle n’apparaît – on en connaît qui rêvent d'en faire autant, avec cette légèreté nimbée d’arrogance méprisante qui est propre aux "bobos" : une catégorie qui n’a jamais vu et ne verra sans doute jamais un immigré camper à ses portes. Pourtant, s’il est vrai que le peuple ne prête qu'une attention distraite aux propos de ces nantis, d’Anne Hidalgo la « reine » de ces bobos à Jack Lang, leur inspirateur « gauche caviar », il en va différemment pour le Souverain Pontife.

Comme celle de ses prédécesseurs au trône de Saint-Pierre, la voix du pape François porte très au-delà de sa personne. C’est pourquoi sa défense obstinée et  aujourd'hui radicale d'une Europe multiculturelle a des côtés suicidaires, à la fois par son irréalisme manifeste – au passage, qui va donc payer la facture d'une telle générosité ? – et par son refus d’en admettre les conséquences. A-t-on informé le pape des menaces que l’ouverture à tous les vents des frontières européennes comporte en matière de terrorisme et de sécurité plus généralement, de tension identitaire voire de simple tolérance à la misère du monde. Il est certes valorisant et éthique d’exhiber sa grande générosité et de faire prévaloir la « sécurité personnelle » sur la « sécurité nationale ». Mais, à ce compte-là, qu’en est-il de la sécurité personnelle des Européens ? Il semble hélas que ce soit le cadet des soucis du pape et c'est précisément ce qui rend difficilement crédibles les leçons manichéennes qu’il professe entre l’Europe et un camp des « bons » essentialisé.

Il n'y a d'ailleurs pas que l'Europe à se retrouver concernée par cette obsession moralisatrice à géométrie variable.  Il y a quelques jours seulement, lors de l'angélus du dimanche, le pape a affiché sa solidarité et demandé le respect des droits de la minorité musulmane des Rohingyas à la suite de violences survenues en Birmanie, un pays à plus de 90% bouddhiste. Ce faisant, il n'a pas hésité à parler de "la persécution de la minorité religieuse de nos frères Rohingya". Mais s'est-il interrogé sur les raisons réelles de telles violences et sur l'exaspération de Bouddhistes dont le moins qu'on puisse dire est qu'ils ne sont pas a priori portés sur la violence ? S'il s'y était résolu, peut-être aurait-il compris que cette violence avait pris la forme d'affrontements entre forces de l'ordre et rebelles rohingyas. Rebelles, mais à quoi donc ? A l'ordre local ? Aux traditions locales ? En effet, on comprend un peu mieux mais pas le Saint Père qui persiste mordicus à évoquer "des gens bons et pacifiques", qui "souffrent depuis des années" et sont "torturés et tués en raison de leurs traditions et de leur foi" en Birmanie.

L’angélisme, on le sait de longue date, a ses limites. Il est plus qu'inquiétant que le pontificat de cet homme déjà octogénaire refuse de le reconnaître et d’en prendre la pleine mesure. Il est encore plus inquiétant que cet angélisme soit de nature sélective. On ne sache pas, en effet, que le pape s'indigne autant des persécutions, permanentes celles-là, des chrétiens et des juifs en terre d'islam.

Il y a urgence cependant. L’angélisme est fatalement souvent voué à l’impasse faute de savoir appréhender les contraintes du réel. Entretemps, il nous aura affligé de ces « idiots utiles » qui nous assènent avec superbe une bonne parole dont ils prêchent l'exemplarité sans jamais en assumer les conséquences. Une semblable impasse guette l'angélisme papal. Il y a peu de chances, en effet, pour que la générosité humaniste du Vatican serve d’exemple à ceux qu'elle cherche à protéger. Gageons, bien au contraire, qu'elle sera plus volontiers perçue comme un signe supplémentaire de faiblesse de la chrétienté et de l’Europe sinon comme un aveu de leur culpabilisation historique : d'où la probabilité de nouveaux appels d'air en matière d'immigration et d'encouragements implicites au terrorisme. Bref, la soumission telle que la présumait Michel Houellebecq n’est plus très loin.

mardi 22 août 2017

Les non-dits d’un pays d'exception



De notre beau pays, les termes de "voyou", d'"islamisme" ou de "terrorisme" sont obstinément absents. Aurait-on la naïveté de penser qu'en niant ces termes, on occultera également les phénomènes qu'ils désignent ?  


On savait déjà que la France était un pays à nul autre pareil au regard de son histoire, de sa culture ou encore de sa situation géographique. Mais on ne savait pas encore jusqu’à quel point.


On observe à présent qu'à la différence de tous les autres pays de la planète, la France ne connaît ni la délinquance ni les voyous qui la propagent. "Voyou" est devenu, en effet, inconnu du vocabulaire en usage auprès de nos pouvoirs publics comme de nos médias. Chaque fois – c’est-à-dire, en fait, tous les jours – que se produit un « incident » du genre automobiles incendiées ou policiers agressés voire expéditions punitives contre des commissariats, les commentaires se bornent à parler de « jeunes » (entendez phonétiquement « djeunes », cela fait plus culturellement folklorique). 


Qui sont donc ces jeunes, dont on ne contestera évidemment l’âge mais dont on pourrait tout aussi légitimement se demander qui ils sont ? Alors là, pas la moindre chance, c’est le mystère absolu. La loi interdit du reste de les nommer ou de mentionner leur appartenance communautaire. Il serait pourtant intéressant de le savoir. Notez que, pour en avoir une réponse édifiante, il suffit de mettre un pied dans un palais de justice. Que découvrirait-on dans les prétoires ? Je vous en laisse la surprise que je ne puis hélas déflorer sous peine de tomber moi-même sous le coup de la loi. Pour ne pas en avoir tenu compte, Eric Zemmour fut traîné, il y a peu, devant les tribunaux (comme le fut tout aussi bien Georges Bensoussan) et reste aujourd’hui harcelé sans relâche par une bien-pensance revancharde qui n’a de cesse qu’elle ne le fasse interdire d’antenne quand elle ne l’empêche pas simplement de s’exprimer. Pas de liberté pour les ennemis de la liberté ! ainsi que le clamait autrefois celui qu’on surnommait  l’« incorruptible » et à qui l'on doit la Terreur révolutionnaire.

Donc, aucune mention de « voyous » dans nos médias et a fortiori pas de « racaille » n’en déplaise à un de nos anciens présidents qui, il y a quelques années, en indigna plus d'un pour avoir simplement exprimé des velléités de "karcher" à ce sujet. On en déduira logiquement que la France est épargnée par la délinquance. Gageons que notre pays de cocagne est tout autant préservé de l’islamisme, un autre tabou que personne aujourd’hui ne s’aviserait sérieusement de transgresser. Pour avoir simplement osé mentionner le terrorisme islamique au détour d'un discours, Manuel Valls, qui était alors chef du gouvernement, doit encore s’en souvenir. L’islamisme n’existe pas, qu’on se le dise, et à plus forte raison l'islamo-fascisme ! On est même sommé de les extraire de notre terminologie quotidienne. Pas d’amalgame avec l’islam, que diable ! des fois que certains esprits espiègles en aient l’idée.

Pas d’islamisme mais pas de terrorisme non plus, apparemment. Au lendemain des attentats de Barcelone, notre ministre de l’intérieur ne parlait-il pas d’« événement exceptionnel » ? Il est vrai que ceux qui s’attendraient à enregistrer un attentat à la voiture-bélier chaque jour en seraient pour leurs frais. Evénement exceptionnel donc. Pas d’affolement, bonne gens ! CQFD. Pourtant, que répondre à ceux qui estiment que nous devrons désormais nous habituer à vivre avec le terrorisme ?

Au demeurant, on n’emploie même plus le terme de « terroristes » à la radio ou sur nos prétendues chaînes d’info : vous entendrez plus volontiers à la place le nouveau vocable d’« assaillants » agréé et estampillé par la nov’langue. Ayons l’impertinence de consulter le Petit Robert à ce sujet. On y lira : « Personne qui assaille, attaque ». Sans doute sommes-nous dans ce cas de figure. Le vénérable dictionnaire a tout de même soin de mentionner à titre d’exemple « l’armée assaillante » ou encore « les soldats assaillants » donnant ainsi l’idée d’une armée plus ou moins organisée dans une guerre plus ou moins classique. La conséquence en est limpide quoique subliminale : que ne s'en était-on déjà aperçu, les assassins du Bataclan et de la Promenade des Anglais étaient tout bonnement des « soldats », comme d’autres avant eux à l'occasion de ces guerres qui peuplent nos manuel scolaires ; quant à leur cause, on présume raisonnablement qu'elle en vaut bien d’autres, relativisme oblige. Des soldats et des causes que, pour peu, on tiendrait pour respectables. Perdu ou non, un soldat mérite en effet le respect au même titre que la cause qu’il défend (d'où la substitution insidieuse du vocable de « défense » à celui d’« agression »).


La conclusion ? La France ne connaît pas plus le terrorisme que la délinquance, pour la bonne raison qu'il n’y existe point de terroristes. Désolé pour les victimes, il faut croire que les récents attentats de 2015 et 2016 n'étaient que de simples malentendus. Quant à Mohammed Merah, il n'a jamais été un meurtrier odieux auprès des « quartiers » que persiste à cajoler une certaine gauche mais bel et bien un héros authentique, quasiment une légende. 

 La preuve par neuf de ce que la France n’est décidément pas un pays comme les autres ? A Barcelone, les médias parlaient de terrorisme aussitôt après la perpétration de l'attentat. Hier à Marseille, quelques minutes seulement après la mort d’une personne écrasée dans un abribus par une voiture assassine, le Procureur de la République s’est empressé d'exciper d'un « cas psychiatrique » n’ayant évidemment rien à voir avec le drame de Barcelone … pour le cas où des esprits malveillants auraient pu nourrir de mauvaises pensées. Aujourd'hui même, Gérard Collomb a précisé qu'un tiers des fichiers de radicalisation relèvent de la psychiatrie. Sous-entendez : ces gens-là souffrent, il faut les aider. Leurs victimes ? Bah ! Des dommages collatéraux et voilà tout. Bien sûr que, parmi les terroristes, se trouvent une foultitude d'individus désaxés ou dérangés mentalement. Ne faut-il pas l'être pour épouser la cause du djihadisme ? Mais voilà, il ne s'agit pas de simples fous mais de tueurs. Et le fait de mettre en avant leur état psychique est déjà un début de théorie de l'excuse. 

Il est tout de même étrange qu'aucun pays européen touché par le terrorisme ne se soit risqué à mettre en avant la dimension psychiatrique des meurtriers. C'est à croire que les fous ont fait de la France une terre d'élection. Jusqu’où va l’exceptionnalisme français, tout de même !

lundi 21 août 2017

Tourist go home !



A force de refuser les touristes au nom d’une prétendue authenticité, voici que les indépendantistes catalans sont exaucés par les islamistes.

On ne saurait reprocher aux terroristes qui viennent de perpétrer les récents attentats de Barcelone et de Cambrils d’avoir manqué d’à-propos. Il y a quelques jours seulement, des militants de l’extrême-gauche catalane C.U.P, un parti fort d’une dizaine de membres au Parlement de Catalogne, ne manifestaient-ils pas bruyamment sur le thème : « Tourist, go home ! Refugees welcome ! » ?

Les voilà donc satisfaits et même au-delà de leurs espérances. En effet, aussi vrai qu’ils ont quitté massivement la France au lendemain des attentats du Bataclan, en novembre 2015, et de la Promenade des Anglais en juillet 2016, les touristes vont sans doute être refroidis durablement par l’Espagne. Rappel d’un simple petit détail : ce pays avait accueilli 75 millions de touristes l’année dernière.

Quant aux « réfugiés », pas de problème, ils vont continuer d’affluer avec la bénédiction des bien-pensants. Et de faire prospérer l’amalgame spécieux – mais tenu pour « vertueux » celui-là – entre réfugiés politiques, de type syrien par exemple, et migrants économiques. Qu’importe ! « Réfugié », cela sonne quand même mieux tout en présentant l’avantage d’évacuer par avance toute espèce de débat. Car un réfugié, n’est-ce pas, cela doit s’accueillir sans discussion au risque pour l’« accueillant » - à qui on s’est évidemment bien gardé de demander son avis –de passer pour un xénophobe, un « réactionnaire » ou un « ranci » selon la terminologie dominante.

Bien sûr, on aura droit dans le même temps à un florilège de tout ce que la compassion et la repentance occidentales (au fond, ces attentats, ne les avons-nous pas cherchés ?) peuvent nous offrir de meilleur : petites bougies, bouquets de fleurs et peluches garanties, sans parler des traditionnelles pancartes – dont on imagine à quel point elles peuvent être dissuasives – « menaçant » les assassins de ne pas avoir pas la haine de leurs victimes…

Et après ? « Les touristes partis », comme le chantait naguère Jean Ferrat, tout reprendra petit à petit son aspect habituel. Parce que le temps le plus vivace du deuil sera passé, parce que l’information chasse l’information et qu’un nouvel attentat ailleurs, dont les médias ne voudront pas perdre la moindre miette, aura effacé des esprits le précédent. E la nave va ! Vogue la galère ! Une galère qui persistera à pointer en priorité absolue les dangers incarnés par l’extrême-droite, auprès desquels ceux liés à l’islamisme radical ne sont que calembredaine méprisable. Une galère qui se focalisera derechef sur le risque que fait courir au monde Donald Trump, plus grave de toute évidence que celui suscité par Kim Jong Un. Une galère qui nous assénera encore et encore le refrain de l’apartheid sioniste ou des prétendues atrocités commises par les Israéliens envers les « pauvres-Palestiniens-sans-défense ».

Il n’en reste pas moins qu’à Barcelone, les touristes seront partis. L’extrême-gauche catalane, qui n’a d’égale dans le sectarisme et l’absurde que notre extrême-gauche mélenchonienne, pourra alors s’estimer comblée. On demeurera enfin entre soi, à savoir entre gauchistes, indépendantistes et réfugiés, ces « damnés de la terre » new-look que s'obstinent à célébrer sans relâche le Monde, Télérama ou Arte. Chez nous, du reste, on y rajouterait un zeste de féminisme radical voire une pincée d’anticolonialisme vintage du genre CRAN ou Indigènes de la République. Peut-être même – qui sait ? – interdirait-on de nouveau l’accès de certains cénacles aux Blancs ou aux mâles de plus de cinquante ans pour reprendre la formule désormais célèbre de madame Ernotte, dont on se demande bien au passage quand on se décidera à l'exfiltrer de France Télévision. 

Et puis après ? Tout rentrera dans l’ordre, cela va sans dire. Les élites télévisuelles pourront reprendre le fil de leurs diatribes convenues contre les vrais « ennemis de la liberté » : l’extrême-droite ou encore Zemmour, Finkielkraut, Onfray ou Bruckner. Les historiens en cour pourront reprendre leurs plaidoyers relativistes magnifiant l’« idéalisme » de Robespierre ou des communistes. Dans l’apathie générale, ils pourront poursuivre leur déconstruction du discours historique national, qualifié par Médiapart de « frileux » et de « méchant », ainsi que l’endoctrinement idéologique de nos collégiens et lycéens – via un enseignement biaisé de la colonisation et de l’esclavagisme - dans la haine de la France. 

Entretemps, outre-Atlantique, le maire de New York Bill de Blasio aura fait le ménage en escamotant la plaque commémorative datant de 1931 et consacrée à Pétain. Un escamotage assez burlesque compte tenu de l’indifférence avérée des Américains pour l’histoire quand il ne s’agit pas de la leur. Y a-t-il un Américain sur cent mille pour avoir seulement entendu parler du maréchal ou de Vichy (un lieu où, on l’oublie trop souvent, les Etats-Unis conservèrent longtemps une représentation officielle nonobstant la nature de la « révolution nationale » française) ? Ouf ! Merci M. de Blasio, d’y avoir pensé – au bon moment, qui plus est, celui de mettre en difficulté Donald Trump - et d’assainir aussi "courageusement" l’atmosphère de la Grosse Pomme. Il est vrai qu’en matière de courage, le vrai celui-là, on peut sérieusement douter qu'il arrive à la cheville d’un de ses illustres prédécesseurs, Fiorello La Guardia … 

Bref, le climat redeviendra apaisé, donc propice à un nouvel attentat de Daesh. Les militants islamistes pourraient se tordre de rire s’ils avaient le sens de l’humour. Par bonheur pour nous, leur vénération psychotique d’Allah les rend irrémédiablement hermétiques aux «  Lol » et autres « Mdr ».